Les objectifs de microscope sont peut-être les composants les plus importants d’un microscope optique, car ils sont responsables de la formation de l’image primaire et jouent un rôle central dans la détermination de la qualité des images que le microscope peut produire. Les objectifs jouent également un rôle essentiel dans la détermination du grossissement de l’image d’un échantillon et de la résolution avec laquelle les détails fins de l’échantillon peuvent être observés au microscope.
L’objectif est le composant d’un microscope optique le plus difficile à concevoir et à assembler. Il s’agit du premier composant atteint par la lumière lors de son cheminement de l’échantillon au plan image. Le terme « objectif » tire son nom du fait que l’objectif est le composant optique placé le plus proche de l’objet (échantillon) dont on prend une image.
Les principaux fabricants de microscopes proposent une vaste gamme d’objectifs dotés d’excellentes caractéristiques optiques sous un large spectre de conditions d’éclairage et divers degrés de correction des aberrations optiques primaires. L’objectif illustré dans la figure 1 est un objectif apochromatique à grande distance frontale d’un grossissement de 250x. Il est constitué de 14 éléments optiques qui sont combinés ensemble comme suit : trois doublets de lentilles, un triplet de lentilles et trois lentilles simples internes isolées. L’objectif comprend également une lentille frontale hémisphérique et une lentille secondaire ménisque, qui fonctionnent de manière synchrone pour capter les rayons de lumière avec une grande ouverture numérique élevée et une aberration sphérique minimale. Bien que cela ne soit pas le cas pour cet objectif, de nombreux objectifs de fort grossissement dotés d’une conception similaire sont équipés d’un dispositif rétractable à ressort qui protège les lentilles frontales et l’échantillon contre les dommages dus à une collision. Les lentilles internes sont minutieusement orientées et étroitement empilées dans un barillet en laiton enchâssé dans la chemise de l’objectif. Les caractéristiques techniques des objectifs, notamment l’ouverture numérique, le grossissement, la longueur du tube optique, le degré de correction des aberrations, sont imprimées ou gravées sur la surface externe de la chemise. Bien que l’objectif illustré dans la figure 1 soit conçu pour être utilisé dans l’air, à savoir que le milieu d’imagerie entre la lentille frontale de l’objectif et l’échantillon est de l’air, d’autres modèles d’objectifs sont équipés de lentilles frontales qui peuvent être immergées dans l’eau, la glycérine ou une huile hydrocarbonée spéciale.
Les objectifs modernes, qui comprennent de nombreuses lentilles internes en verre, ont atteint des niveaux de qualité et de performance exceptionnels, leur degré de correction des aberrations et de la planéité du champ déterminant leur utilité et leur coût. Les techniques et les matériaux utilisés pour fabriquer les objectifs se sont nettement améliorés au cours des 100 dernières années. De nos jours, les objectifs sont conçus à l’aide d’outils de conception assistée par ordinateur (CAO) et de formules complexes de verres à base d’éléments rares de composition et de qualité uniformes ayant des indices de réfraction hautement spécifiques. L’amélioration des performances a été rendue possible grâce à ces techniques de pointe, ce qui a permis aux fabricants de produire des objectifs ayant une très faible dispersion et corrigés de la plupart des artefacts optiques courants comme le coma, l’astigmatisme, la distorsion géométrique, la courbure de champ, les aberrations sphériques et chromatiques. Non seulement les objectifs de microscope actuels sont désormais corrigés de plus d’aberrations sur des champs plus grands, mais la lumière parasite a également été notablement réduite tout en augmentant considérablement la transmission de la lumière, ce qui permet de produire des images remarquablement lumineuses, nettes et contrastées.
Trois caractéristiques critiques de l’objectif déterminent la limite de résolution maximale du microscope. Celles-ci comprennent la longueur d’onde de la lumière utilisée pour éclairer l’échantillon, l’ouverture angulaire du cône de lumière capté par l’objectif et l’indice de réfraction de l’espace entre la lentille frontale de l’objectif et l’échantillon. La résolution d’un microscope optique limité par la diffraction peut être décrite comme la distance détectable minimale entre deux points de l’échantillon proches l’un de l’autre :
R = λ / 2n(sin(θ))
où R est la distance de séparation, λ la longueur d’onde d’éclairage, n l’indice de réfraction du milieu d’imagerie et θ la moitié de l’angle d’ouverture de l’objectif. Lorsque l’on examine cette équation, il devient évident que la résolution est directement proportionnelle à la longueur d’onde d’éclairage. L’œil humain répond aux longueurs d’onde comprises entre 400 et 700 nanomètres, ce qui correspond au spectre de la lumière visible qui est utilisé pour la majorité des observations faites au microscope. La résolution est également dépendante de l’indice de réfraction du milieu d’imagerie et de l’ouverture angulaire de l’objectif. Les objectifs sont conçus pour produire des images des échantillons avec de l’air ou un milieu avec d’un indice de réfraction plus élevé entre la lentille frontale et l’échantillon. Le champ d’observation s’avère souvent plutôt limité, et la lentille frontale de l’objectif est positionnée à proximité de l’échantillon avec lequel elle doit maintenir un contact optique. Il est possible d’atteindre un gain de résolution d’environ 1,5 lorsque de l’huile d’immersion est utilisée à la place de l’air en tant que milieu d’immersion.
Le dernier facteur, peut-être le plus important, qui détermine la résolution d’un objectif est l’ouverture angulaire, qui a une limite supérieure utile d’environ 72 degrés (avec une valeur du sinus de 0,95). Le produit de l’indice de réfraction et du sinus :
n(sin(θ))
est appelé ouverture numérique (ON) et fournit un indicateur pratique de la résolution de n’importe quel objectif donné. L’ouverture numérique constitue généralement le critère le plus important (hormis la correction optique) à prendre en compte pour choisir un objectif de microscope. Les valeurs vont de 0,1 pour les objectifs de très faible grossissement (1x à 4x) à 1,6 pour les objectifs à hautes performances utilisant des huiles d’immersion spécifiales. En général, pour une gamme d’objectifs de même grossissement, plus l’ouverture numérique est grande, plus la capacité à capter la lumière et la résolution de l’objectif augmentent. Le microscopiste doit bien choisir le grossissement de son objectif, de sorte que, dans des conditions optimales d’observation, les détails qui sont juste résolus soient suffisamment agrandis pour être facilement observables, mais pas au point que le grossissement vide empêche l’observation des détails fins de l’échantillon.
De la même manière que la luminosité de l’éclairage d’un microscope est déterminée par le carré de l’ouverture numérique du condenseur, la luminosité d’une image produite par l’objectif est, quant à elle, déterminée par le carré de l’ouverture numérique de l’objectif. En outre, le grossissement de l’objectif joue également un rôle dans la détermination de la luminosité de l’image, celle-ci étant inversement proportionnelle au carré du grossissement latéral. Le carré du rapport ouverture numérique/grossissement exprime le pouvoir collecteur de lumière de l’objectif lorsqu’il est utilisé avec un éclairage en lumière transmise. Étant donné que les objectifs à grande ouverture numérique sont souvent mieux corrigés des aberrations, ils captent également plus de lumière et produisent une image plus lumineuse et mieux corrigée avec une excellente résolution. Il est important de noter que la luminosité de l’image décroît rapidement à mesure que le grossissement augmente. Dans les cas où l’intensité lumineuse constitue un facteur limitant, choisissez un objectif avec la plus grande ouverture numérique possible mais ayant le plus faible facteur de grossissement capable de produire la résolution adéquate.
Les objectifs les moins onéreux (et les plus courants), utilisés principalement avec des microscopes de laboratoire, sont des objectifs achromatiques. Ces objectifs sont corrigés des aberrations chromatiques axiales de deux longueurs d’onde (bleu et rouge, environ 486 et 656 nanomètres, respectivement), qui sont focalisées en un seul point focal commun. En outre, les objectifs achromatiques sont corrigés des aberrations sphériques dans le vert (546 nanomètres ; voir le tableau 1). La correction limitée des objectifs achromatiques peut entraîner l’apparition de nombreux artefacts lorsque les échantillons sont examinés et photographiés en couleur avec un microscope. S’il est choisi d’effectuer la mise au point sur la région verte du spectre, les images présenteront un halo magenta rougeâtre (souvent appelé couleur résiduelle). Les objectifs achromatiques donnent leurs meilleurs résultats lorsque la lumière passe au travers d’un filtre vert (généralement un filtre interférentiel) et en utilisant un film noir et blanc pour la photomicrographie. L’absence de correction de la planéité du champ (ou courbure de champ) constitue un frein supplémentaire à l’utilisation des objectifs achromatiques. Ces dernières années, la grande majorité des fabricants ont commencé à adjoindre des corrections de la planéité du champ aux objectifs achromatiques et ont donné à ces objectifs corrigés le nom d’objectifs planachromatiques.
Les objectifs dits fluor ou semi-apochromatiques (illustrés par l’objectif central sur la figure 2), nommés ainsi car de la fluorine était à l’origine utilisée pour leur fabrication, possèdent un meilleur niveau de correction pour un coût plus élevé. La figure 2 représente les trois principales catégories d’objectifs : les objectifs achromatiques avec le plus faible niveau de correction, présentés ci-dessus ; les objectifs à la fluorine (ou semi-apochromatiques) qui sont, eux, dotés de corrections des aberrations sphériques ; et, enfin, les objectifs apochromatiques qui constituent les objectifs avec le haut niveau de correction. Sur la figure 2, l’objectif de gauche est un objectif achromatique de grossissement 10x qui comprend deux doublets internes et une lentille frontale. L’objectif situé au centre de la figure 2 est un objectif semi-apochromatique de grossissement 10x comprenant, en plus d’une lentille frontale hémisphérique et d’une lentille ménisque secondaire, plusieurs groupes de lentilles, notamment deux doublets et un triplet. Sur la figure 2, l’objectif de droite est un objectif apochromatique de grossissement 10x qui comprend plusieurs groupes de lentilles et des lentilles simples. Bien que sa structure soit similaire à celle des objectifs semi-apochromatiques, les lentilles ont des épaisseurs, des courbures et des arrangements différents de ceux des lentilles des objectifs apochromatiques.
Type
d’objectif | Aberration
sphérique | Aberration
chromatique | Courbure
de champ |
---|---|---|---|
Objectif achromatique | 1 couleur | 2 couleurs | Non |
Objectif planachromatique | 1 couleur | 2 couleurs | Oui |
Objectif semi-apochromatique | 2-3 couleurs | 2-3 couleurs | Non |
Objectif plan à la fluorine | 3-4 couleurs | 2-4 couleurs | Oui |
Objectif planapochromatique | 3-4 couleurs | 4-5 couleurs | Oui |
Au cours de l’assemblage de l’objectif, les lentilles sont tout d’abord espacées de manière stratégique et fixées aux montants, puis elles sont empilées dans un barillet central enchâssé dans la chemise de l’objectif. Chaque lentille est logée contre un support en laiton en la faisant tourner à l’aide d’un mandrin de tour de précision, la lentille (ou le groupe de lentilles) est ensuite verrouillée en place par brunissage d’un fin anneau de métal. Les aberrations sphériques sont corrigées en choisissant le jeu d’espaceurs le plus adapté à placer entre les deux montants des lentilles inférieures (la lentille hémisphérique et la lentille ménisque). L’objectif est rendu parfocal par translocation de tout l’ensemble de lentilles vers le haut ou vers le bas à l’intérieur du barillet au moyen d’écrous, de sorte que les objectifs montés sur une tourelle porte-objectifs puissent être changés sans que la mise au point soit perdue. Pour corriger le coma, il suffit d’utiliser les trois vis de centrage pour optimiser la position des groupes de lentilles internes par rapport à l’axe optique de l’objectif.
Les objectifs semi-apochromatiques sont fabriqués à partir de formules de verres de pointe qui contiennent des matériaux comme de la fluorine ou de nouveaux substituts synthétiques. Ces nouvelles formules permettent d’améliorer considérablement la correction des aberrations optiques. Similaires aux objectifs achromatiques, les objectifs semi-apochromatiques aussi corrigés des aberrations chromatiques rouge et bleue. En outre, contrairement aux objectifs achromatiques qui ne sont corrigés des aberrations sphériques que pour une seule couleur, les objectifs semi-apochromatiques sont corrigés pour deux ou trois couleurs. La correction des objectifs semi-apochromatiques supérieure à celle des objectifs achromatiques permet de les concevoir avec une ouverture numérique plus grande pour pouvoir prendre des images plus lumineuses. Les objectifs semi-apochromatiques possèdent également un meilleur pouvoir de résolution que les objectifs achromatiques et assurent un plus haut degré de contraste, ce qui les rend plus adaptés que les objectifs achromatiques à la photomicrographie couleur en lumière blanche.
Découvrez comment la taille du cône de lumière entrant par la lentille frontale de l’objectif change avec la valeur de l’ouverture numérique de l’objectif.
Les objectifs apochromatiques, illustrés dans les figures 2 et 3 constituent le niveau de correction le plus élevé (et le plus coûteux). Les objectifs apochromatiques sont les objectifs de microscope les mieux corrigés actuellement disponibles sur le marché. Leur coût élevé reflète la conception sophistiquée et l’assemblage précis nécessaire à leur fabrication. Dans la figure 3, nous comparons les lentilles d’une série d’objectifs apochromatiques de grossissement de 10 à 100x. Les objectifs apochromatiques de faible grossissement (10 et 20x) sont plus courts et ont une distance frontale plus longue que les objectifs apochromatiques de fort grossissement (40 et 100x). En règle générale, les objectifs apochromatiques sont corrigés des aberrations chromatiques pour trois couleurs (rouge, vert et bleu), ce qui élimine presque toutes les aberrations chromatiques. Ils sont également corrigés des aberrations sphériques pour deux ou trois longueurs d’onde (voir le tableau 1). Les objectifs apochromatiques constituent le meilleur choix pour la photomicrographie couleur en lumière blanche. En raison de leur haut niveau de correction, les objectifs apochromatiques possèdent généralement, pour un grossissement donné, des ouvertures numériques plus grandes que les objectifs achromatiques ou semi-apochromatiques. Un grand nombre des objectifs apochromatiques et semi-apochromatiques à hautes performances récents sont corrigés des aberrations chromatiques pour au moins quatre couleurs (bleu foncé, bleu, vert et rouge) ou pour les aberrations sphériques pour quatre couleurs.
Les trois types d’objectifs souffrent d’une courbure de champ importante et projettent des images incurvées plutôt que planes, un artefact qui s’accentue avec le grossissement. Pour surmonter cet état intrinsèque dû à la courbure des surfaces des lentilles, les développeurs de composants optiques ont mis au point des objectifs corrigés pour la planéité ou plans qui produisent des images nettes sur tout le champ d’observation. Les objectifs avec une correction de la courbure de champ et une faible distorsion sont des objectifs dits planachromatiques, plan fluor ou plan apochromatiques, selon leur degré d’aberration résiduelle. Une telle correction, bien qu’onéreuse, est appréciable en imagerie numérique et en photomicrographie traditionnelle.
Une lentille simple focalise les points de l’image d’un grand objet plat, comme un échantillon sur une lame de microscope, sur une surface sphérique ressemblant à une assiette creuse. Découvrez dans quelle mesure les aberrations de courbure dégradent les images observées au microscope.
Commencer le tutoriel »La courbure de champ non corrigée est l’aberration optique la plus grave qui se produit dans les objectifs semi-apochromatiques et apochromatiques. Pendant de nombreuses années, cet artefact a été considéré comme inévitable. Durant la microscopie de routine, il fallait sans cesse refaire la mise au point lorsque l’on passait du centre à la périphérie de l’échantillon afin d’avoir une image nette de tous les détails de l’échantillon. L’introduction de la correction de la planéité sur les objectifs a permis leur utilisation en photomicrographie et vidéomicroscopie. Aujourd’hui, ces corrections sont des caractéristiques de série, aussi bien sur les objectifs à usage général que sur les objectifs à hautes performances. Comme vous pouvez le voir dans la figure 4, avec un simple objectif achromatique, la correction de la courbure de champ augmente considérablement le nombre de lentilles nécessaires à l’intérieur de l’objectif. L’objectif achromatique non corrigé situé à gauche dans la figure 4 renferme deux doublets, en plus d’une fine lentille frontale simple. L’objectif planachromatique corrigé situé à droite dans la figure 4 en revanche comprend trois doublets de lentilles, un triplet de lentilles central et une lentille ménisque placée juste derrière la lentille frontale hémisphérique. Dans cet exemple, la correction de la courbure du champ a nécessité l’addition de six lentilles réparties en plusieurs groupes de lentilles plus sophistiqués, ce qui a considérablement augmenté la complexité optique de l’objectif. L’augmentation importante du nombre de lentilles utilisées pour la correction de la courbure du champ est également nécessaire pour les objectifs semi-apochromatiques et apochromatiques, ce qui se traduit des objectifs où les lentilles occupent tout l’espace à l’intérieur du barillet (voir la figure 1). En règle générale, les objectifs plans corrigés pour la courbure du champ sacrifient beaucoup de distance frontale libre, et leurs versions de fort grossissement sont souvent équipées d’une lentille frontale concave qui peut s’avérer très difficile à nettoyer et entretenir.
Les objectifs les plus anciens possèdent généralement une ouverture numérique plus petite et sont sujets à une aberration appelée différence chromatique de grossissement qui peut être corrigée à l’aide d’oculaires de compensation spécialement conçus. Ce type de correction était très répandu à l’ère des microscopes à longueur de tube fixe, mais n’est pas nécessaire avec les microscopes et objectifs corrigés à l’infini les plus récents. Ces dernières années, la correction de la différence chromatique du grossissement des objectifs de microscope modernes est directement intégrée aux objectifs (Olympus et Nikon) ou effectuée au niveau de la lentille du tube (Leica et Zeiss).
L’image intermédiaire dans un système corrigé à l’infini se forme à la distance focale de référence (anciennement, longueur du tube optique) derrière la lentille de tube dans le trajet optique. Cette distance varie de 160 à 250 millimètres, en fonction des contraintes de conception imposées par le fabricant. Le grossissement d’un objectif corrigé à l’infini est calculé en divisant la distance focale de référence par la distance focale de l’objectif.
Pour la plupart des applications biologiques et pétrographiques, une lamelle couvre-objet est utilisée pour monter l’échantillon, à la fois pour protéger l’intégrité de l’échantillon et pour fournir une fenêtre transparente pour l’observation. Si elle fait converger les cônes de lumière provenant de chaque point de l’échantillon, la lamelle couvre-objet induit également des aberrations sphériques et chromatiques (et, par conséquent une perte de contraste) qui doivent être corrigées par l’objectif. Le degré auquel les rayons lumineux convergent est déterminé par l’indice de réfraction, la dispersion et l’épaisseur de la lamelle couvre-objet. Bien que l’indice de réfraction soit relativement constant au sein d’un même lot de lamelles couvre-objet, l’épaisseur peut varier entre 0,13 et 0,22 millimètre. Le solvant aqueux ou l’excès de milieu de montage utilisé entre l’échantillon et la lamelle couvre-objet dans les montages humides ou épais constituent une autre source de distorsions. Par exemple, dans une solution saline physiologique avec un indice de réfraction sensiblement différent de celui de la lamelle couvre-objet, la mise au point avec l’objectif doit se faire à travers une couche d’eau de seulement quelques microns d’épaisseur, ce qui conduit à des aberrations importantes et à une déviation de la fonction d’étalement du point qui n’est alors plus symétrique de part et d’autre du plan focal. Ces facteurs s’ajoutent aux variations de l’indice de réfraction et de l’épaisseur de la lamelle couvre-objet et sont très difficiles à contrôler pour le microscopiste.
Le milieu d’imagerie entre la lentille frontale de l’objectif et la lamelle couvre-objet de l’échantillon est également un facteur très important quant à la correction des aberrations sphériques et du coma à prendre en compte lors de la conception des lentilles d’objectif. Les objectifs de faible grossissement ont une ouverture numérique relativement petite et sont conçus pour être utilisés à sec, à savoir avec seulement de l’air comme milieu d’imagerie entre la lentille frontale et la lamelle couvre-objet. L’ouverture numérique théorique maximale pouvant être atteinte dans l’air est 1,0. Toutefois, en pratique, il est pratiquement impossible de produire un objectif à sec avec une ouverture numérique supérieure à 0,95. L’impact de la variation de l’épaisseur des lamelles couvre-objet est négligeable pour les objectifs à sec ayant une ouverture numérique inférieure à 0,4. Toutefois, une telle variation devient significative dès lors que l’ouverture numérique est supérieure à 0,65, car des fluctuations de seulement 0,01 millimètre peuvent induire une aberration sphérique. Cela pose problème avec les objectifs apochromatiques de fort grossissement puisqu’ils utilisent des distances frontales très courtes dans l’air et contiennent des corrections sensibles des aberrations sphériques qui rendent difficile l’obtention d’images nettes.
Découvrez dans quelle mesure les lentilles internes d’un objectif à sec à grande ouverture numérique peuvent être ajustées pour corriger les écarts d’épaisseur des lamelles couvre-objet.
Commencer le tutoriel »Pour y remédier, de nombreux objectifs apochromatiques à sec à hautes performances sont équipés d’une bague de correction, qui permet d’ajuster la position des lentilles internes pour corriger les aberrations sphériques par compensation de l’épaisseur variable des lamelles couvre-objet (voir la figure 5). La correction optique des aberrations sphériques s’effectue par rotation de la bague, ce qui entraîne le rapprochement ou l’éloignement de deux des groupes de lentilles de l’objectif. Dans la figure 5, les lentilles ajustables de l’objectif de gauche ont été rapprochées très proches les unes des autres par rotation la bague de correction afin de compenser l’épaisseur de 0,20 mm de la lamelle couvre-objet. À titre de comparaison, les lentilles ajustables de l’objectif de droite de la figure 5 sont plus éloignées que sur l’objectif de gauche afin de compenser la très faible épaisseur de la lamelle couvre-objet (0,13 mm). Une majorité des objectifs équipés d’une bague de correction et conçus spécialement pour les microscopes droits à lumière transmise possède une plage d’ajustement pour compenser des épaisseurs de lamelles couvre-objet allant de 0,10 à 0,23 millimètre. La plupart des objectifs à contraste de phase conçus pour l’observation d’échantillons de culture tissulaire au microscope inversé possèdent une plage de compensation encore plus large allant de 0 à 2 millimètres. Cela permet d’observer des échantillons à travers le fond de la majorité des récipients de culture, ce qui est appréciable puisque leur épaisseur varie souvent de manière importante. Les échantillons non couverts, comme les frottis sanguins, peuvent également être observés avec des objectifs dotés d’une bague de correction lorsque la bague est réglée sur 0 pour tenir compte de l’absence d’une lamelle couvre-objet.
Les objectifs à sec et à grande ouverture numérique qui ne sont pas équipés d’une bague de correction produisent souvent des images de qualité inférieure à celles obtenues avec des objectifs à ouverture numérique plus petite dans le cas où l’épaisseur de la lamelle couvre-objet a moins d’influence. À ce titre, il est souvent avisé de choisir un objectif avec un grossissement plus faible et une ouverture numérique inférieure afin d’obtenir un meilleur contraste sans aucun artefact induit par les écarts d’épaisseur des lamelles couvre-objet. À titre d’exemple, un objectif de grossissement de 40x avec une ouverture numérique de 0,65 peut produire des images de meilleure qualité avec un meilleur contraste et une meilleure netteté qu’un objectif de grossissement de 60x avec une ouverture numérique de 0,85, même si le pouvoir de résolution de l’objectif de plus fort grossissement est théoriquement meilleur.
L’épaisseur standard des lamelles couvre-objet est de 0,17 millimètre. Ces dernières sont connues sous l’appellation lamelle couvre-objet numéro 1½. Malheureusement, toutes les lamelles couvre-objet numéro 1½ fabriquées ne sont pas conformes à cette limite de tolérance (leur épaisseur varie de 0,16 à 0,19 millimètre) et de nombreux échantillons sont séparés de la lamelle couvre-objet par un milieu. La compensation de l’épaisseur des lamelles couvre-objet peut s’effectuer par ajustement de la longueur mécanique de la tête d’observation du microscope ou (comme décrit précédemment) par l’utilisation d’une bague de correction spécialisée permettant de modifier l’espacement entre les éléments critiques à l’intérieur du barrillet de l’objectif. La bague de correction est utilisée pour ajuster l’objectif en fonction de ces différences subtiles pour garantir des performances optimales de l’objectif. L’utilisation correcte des objectifs dotés d’une bague de correction suppose que le microscopiste soit suffisamment expérimenté et vigilant pour pouvoir régler la bague à l’aide de critères adéquats relatifs à l’image. Dans la majorité des cas, la mise au point peut changer et l’image peut dériver pendant l’ajustement de la bague de correction. Suivez les étapes ci-dessous pour ajuster progressivement la bague de correction d’un objectif par petits incréments tout en observant l’impact des ajustements sur l’image de l’échantillon.
L’ouverture numérique de l’objectif peut être drastiquement accrue en concevant l’objectif pour qu’il soit utilisé avec milieu d’immersion comme de l’huile, de la glycérine ou de l’eau. En utilisant un milieu d’immersion dont l’indice de réfraction est similaire à celui de la lamelle couvre-objet, la dégradation de l’image causée par les variations de l’épaisseur des lamelles couvre-objet est pratiquement nulle à l’endroit où les rayons avec un large angle d’incidence ne sont plus réfractés et, ainsi, sont plus facilement captés par l’objectif. Les huiles d’immersion traditionnelles possèdent un indice de réfraction de 1,51 et une dispersion similaire à celle des lamelles couvre-objet. Les rayons lumineux qui traversent l’échantillon rencontre un milieu homogène entre la lamelle couvre-objet et l’huile d’immersion et ne sont pas réfractés au moment où ils pénètrent dans la lentille, ils le sont seulement lorsqu’ils sortent de la surface supérieure de la lentille. Cela implique que si l’échantillon est positionné au point aplanétique (au point focal et au centre du champ) de la première lentille de l’objectif, l’image formée par cette partie du système de lentilles est totalement exempte d’aberrations sphériques.
En général, un objectif à immersion dans l’huile comprend une lentille frontale hémisphérique suivie par une lentille ménisque divergente et un doublet de lentilles. La figure 6 ci-dessus représente les réfractions aplanétiques survenant au niveau des deux premières lentilles dans un objectif apochromatique à immersion dans l’huile typique. L’échantillon est placé en sandwich entre la lame de microscope et la lamelle couvre-objet au point P, à savoir le point aplanétique de la lentille hémisphérique. Les rayons lumineux réfractés à l’arrière de la lentille hémisphérique semblent provenir du point P(1), ce point constituant le centre de la courbure de la première surface de la lentille ménisque. Les rayons lumineux réfractés pénètrent dans la lentille ménisque le long du rayon de sa première surface, sans aucune réfraction au niveau de cette surface. À la surface arrière de la lentille ménisque, les rayons lumineux sont réfractés de manière aplanétique, de sorte qu’ils semblent diverger du point P(2). La réfraction des rayons lumineux au niveau des surfaces des groupes de lentilles suivants achève la convergence des rayons lumineux issus du point P pour former l’image intermédiaire.
Les objectifs à immersion dans l’huile bien conçus corrigent également les défauts chromatiques induits par les deux premières lentilles, tout en causant un minimum d’aberrations sphériques. Le fait que le cône de lumière converge partiellement avant de pénétrer dans la première lentille contribue à limiter les aberrations sphériques. Il est important de noter que l’utilisation d’un objectif à immersion dans l’huile sans huile entre la lamelle couvre-objet et la première lentille produit des images défectueuses. Cela est dû au fait que la réfraction se produit à la surface de la lentille frontale, ce qui induit des aberrations sphériques qui ne peuvent pas être corrigées par les lentilles suivantes de l’objectif.
Les avantages des objectifs à immersion dans l’huile sont gravement compromis en cas d’utilisation du mauvais liquide d’immersion. Les fabricants de microscopes conçoivent des objectifs avec des limites de tolérance étroites pour l’indice de réfraction et la dispersion, qui imposent l’utilisation d’un liquide entre la lamelle couvre-objet et la lentille frontale de l’objectif dont les valeurs se situent dans ces limites. Il est conseillé d’utiliser uniquement l’huile indiquée par le fabricant de l’objectif et de ne pas mélanger les huiles d’immersion de différents fabricants afin d’éviter toute apparition non voulue d’artefacts de cristallisation ou de séparation de phase.
Des objectifs utilisant de l’eau et/ou de la glycérine comme milieu d’imagerie sont également diponibles pour les applications faisant appel à des cellules vivantes en culture ou des coupes tissulaires immergées dans une solution saline physiologique. Les objectifs planapochromatique à immersion dans l’eau sont dotés de bagues de correction et ont des ouvertures numériques allant jusqu’à 1,2, ce qui est légèrement inférieur aux objectifs à immersion dans l’huile. Ces objectifs permettent aux microscopistes de faire une mise au point à travers une épaisseur de milieu aqueux allant jusqu’à 200 microns et de conserver une excellente correction optique. L’inconvénient est que les objectifs à immersion dans l’eau avec une grande ouverture numérique coûtent généralement plusieurs milliers d’euros et que l’image peut toujours être dégradée lorsque l’on fait la mise au point sur un détail d’un composant cellulaire ou d’un tissu réfractif profond. Pour plus d’informations concernant les objectifs à immersion dans l’huile, la glycérine et l’eau, visitez notre section Milieu d’immersion dans Introduction à la microscopie.
Découvrez dans quelle mesure les variations de l’indice de réfraction du milieu d’imagerie ont un impact sur la capacité d’un objectif à capter les rayons lumineux émanant de l’échantillon.
Commencer le tutoriel »Comme indiqué dans notre section sur les caractéristiques techniques et l’identification des objectifs, de nombreuses informations sont inscrites sur la chemise de l’objectif. En résumé, voici les informations gravées sur les objectifs : le grossissement (p. ex. 10x, 20x ou 40x etc.) ; la longueur du tube pour lequel l’objectif a été conçu afin de produire des images d’excellente qualité (généralement 160 millimètres ou le symbole grec de l’infini) ; et l’épaisseur de la lamelle couvre-objet protégeant l’échantillon, dont le fabricant suppose qu’elle a une valeur constante pour la correction des aberrations sphériques (en général, 0,17 millimètre). Si l’objectif doit être utilisé avec un milieu d’immersion à base d’huile, l’un des termes suivants sera gravé sur l’objectif : OIL, OEL ou HI (homogeneous immersion, ou immersion homogène). Dans le cas où ces termes ne sont pas gravés sur l’objectif, cela signifie que ce dernier doit être utilisé à sec, à savoir avec de l’air entre la partie inférieure de l’objectif et l’échantillon. La valeur de l’ouverture numérique (ON) est toujours gravée sur les objectifs. Celle-ci peut varier de 0,04 pour les objectifs de faible grossissement à 1,3 ou 1,4 pour les objectifs apochromatiques à immersion dans l’huile de fort grossissement. En l’absence de marquage indiquant une correction plus élevée, il est communément admis que l’objectif est un objectif achromatique. Les objectifs les plus fortement corrigés portent des inscriptions comme apochromat ou apo, plan, FL, fluor, etc. La distance focale (distance entre la lentille et l’image), qui est une mesure du grossissment, est généralement gravée sur la chemise des objectifs les plus anciens. Avec les microscopes modernes, l’objectif est conçu pour une longueur du tube optique particulière, de sorte qu’il deviendrait redondant de graver la distance focale et le grossissement sur la chemise de l’objectif.
Le tableau 2 comprend la liste des distances frontales et des ouvertures numériques en fonction du grossissement pour les quatre catégories d’objectifs les plus courantes : achromatiques, planachromatiques, plans fluor et planapochromatiques. Notez que les objectifs à sec possèdent tous une ouverture numérique inférieure à 1,0 et que seuls les objectifs conçus pour un milieu d’immersion liquide ont une ouverture numérique supérieure à 1,0.
Grossissement | Ouverture numérique | Distance frontale (mm) |
---|---|---|
Objectif achromatique | ||
4x | 0,10 | 30,00 |
10x | 0,25 | 6,10 |
20x | 0,40 | 2,10 |
40x | 0,65 | 0,65 |
60x | 0,80 | 0,30 |
100x (huile) | 1,25 | 0,18 |
Objectif planachromatique | ||
0,5x | 0,02 | 7,00 |
1x | 0,04 | 3,20 |
2x | 0,06 | 7,50 |
4x | 0,10 | 30,00 |
10x | 0,25 | 10,50 |
20x | 0,40 | 1,30 |
40x | 0,65 | 0,57 |
50x (huile) | 0,90 | 0,40 |
100x (huile) | 1,25 | 0,17 |
40x | 0,65 | 0,48 |
100x | 0,90 | 0,26 |
Objectif plan fluor | ||
4x | 0,13 | 17,10 |
10x | 0,30 | 16,00 |
20x | 0,50 | 2,10 |
40x | 0,75 | 0,72 |
40x (huile) | 1,30 | 0,2 |
60x | 0,85 | 0,3 |
100x (sec) | 0,90 | 0,30 |
100x (huile) | 1,30 | 0,20 |
100x (huile avec iris) | 0.5-1.3 | 0,20 |
Objectif planapochromatique | ||
2x | 0,10 | 8,50 |
4x | 0,20 | 15,70 |
10x | 0,45 | 4,00 |
20x | 0,75 | 1,00 |
40x | 0,95 | 0,14 |
40x (huile) | 1,00 | 0,16 |
60x | 0,95 | 0,15 |
60x (huile) | 1,40 | 0,21 |
60x
(immersion dans l’eau) | 1,20 | 0,22 |
100x (huile) | 1,40 | 0,13 |
100x (huile, NCG) | 1,40 | 0,17 |
NCG = sans lamelle couvre-objet |
Lorsque les objectifs d’un ensemble d’objectifs assortis, p. ex. tous les objectifs achromatiques de grossissements différents (un sous-ensemble unique des objectifs listés dans le tableau 2), sont montés sur la tourelle porte-objectifs, ceux-ci sont généralement conçus pour projeter une image dans le tube du corps du microscope sur quasiment le même plan. Par conséquent, lorsque vous changer d’objectif en faisant pivoter la tourelle porte-objectifs, vous n’avez besoin que de légèrement tourner la molette de mise au point fine pour rétablir la netteté de l’image. Les objectifs d’un tel ensemble sont dits parfocaux, une propriété très pratique et gage de sécurité. Les ensembles d’objectifs sont également conçus pour être parcentriques, ce qui signifie que le centrage d’un échantillon sur le champ d’observation d’un objectif donné ne change pas lorsque vous pivotez la tourelle porte-objectifs pour utiliser un autre objectif.
Pendant de nombreuses années, les objectifs conçus pour les applications biologiques par la majorité des fabricants étaient conformes à une norme internationale pour la distance parfocale. Une majorité des objectifs avaient ainsi une distance parfocale de 45,0 millimètres et étaient considérés comme interchangeables. Avec la migration vers des longueurs de tubes corrigés à l’infini, un nouvel ensemble de critères de conception a vu le jour pour corriger les aberrations observées au niveau des lentilles de tube et d’objectif. Couplée à une demande de flexibilité accrue pour répondre au besoin de distances frontales toujours plus grandes avec des ouvertures numériques et tailles de champ également plus grandes, l’interchangeabilité entre les objectifs fabriqués par des fabricants différents n’est plus possible. Cette transition est illustrée par le système optique moderne Nikon CFI-60 qui comprend des objectifs, des lentilles de tube et des oculaires « sans chrome ». Chaque composant optique du système CFI-60 est corrigé de manière indépendante sans qu’aucun composant ne serve à corriger l’autre. La longueur du tube est fixée à l’infini (trajet optique parallèle) grâce à une lentille de tube, tandis que la distance parfocale a été augmentée à 60 millimètres. Même la taille de filetage de montage de l’objectif a été modifiée et est passée de 20,32 à 25 millimètres afin de répondre aux nouveaux besoins du système optique.
Le diamètre de champ d’un microscope optique est exprimé par l’indice de champ d’observation ou, plus simplement, l’indice de champ, qui est le diamètre du champ d’observation exprimé en millimètres et mesuré au niveau du plan image intermédiaire. Le diamètre de champ au niveau du plan objet (échantillon) est l’indice de champ divisé par le grossissement de l’objectif. Bien que l’indice de champ soit souvent limité par le grossissement et le diamètre du diaphragme de champ de l’oculaire, il existe clairement une limite également imposée par la conception de l’objectif. Le diamètre de champ utile maximal des premiers objectifs de microscope était limité à 18 millimètres environ (ou bien moins pour les oculaires de fort grossissement), mais les objectifs planapochromatiques modernes et autres objectifs à champ plat possèdent souvent un champ utile pouvant aller de 22 à 28 millimètres, voire plus lorsqu’ils sont combinés à des oculaires à grand champ. Malheureusement, l’indice de champ utile maximal n’est généralement pas gravé sur la chemise de l’objectif et n’est pas non plus indiqué dans les catalogues de microscopes.
La plage axiale sur laquelle il est possible de faire la mise au point avec un objectif sans que cela ait un impact notable sur la netteté de l’image est appelée la profondeur de champ de l’objectif. Cette valeur varie fortement en fonction de l’ouverture numérique de l’objectif, généralement en diminuant avec l’augmentation de l’ouverture numérique (voir le tableau 3 et la figure 7). Avec les grandes ouvertures numériques, la profondeur de champ est principalement déterminée par l’optique ondulatoire, alors qu’avec les petites ouvertures numériques, c’est la notion de « cercle de diffusion » de l’optique géométrique qui domine. La profondeur de champ totale est la somme des profondeurs de champ des optiques ondulatoire et géométrique :
dtot = λn/ON2 + (n/M•ON)e
dans laquelle λ est la longueur d’onde d’éclairage, n l’indice de réfraction du milieu d’imagerie, ON l’ouverture numérique de l’objectif, M le grossissement latéral de l’objectif et e la plus petite distance pouvant être résolue par un détecteur positionné dans le plan image de l’objectif. Notez que la profondeur de champ limitée par la diffraction (première variable de la partie droite de l’équation) est inversement proportionnelle au carré de l’ouverture numérique, tandis que la limite de résolution latérale décroit avec la première puissance de l’ouverture numérique. Il en ressort que la résolution axiale et l’épaisseur des coupes optiques sont bien plus affectées par l’ouverture numérique du système que la résolution latérale du microscope (voir le tableau 3).
Grossissement | Ouverture numérique | Profondeur de champ
(µm) | Profondeur de l’image
(mm) |
---|---|---|---|
4x | 0,10 | 15,5 | 0,13 |
10x | 0,25 | 8,5 | 0,80 |
20x | 0,40 | 5,8 | 3,8 |
40x | 0,65 | 1,0 | 12,8 |
60x | 0,85 | 0,40 | 29,8 |
100x | 0,95 | 0,19 | 80,0 |
La distance de dégagement entre la surface de la lamelle couvre-objet la plus proche de l’objectif et la lentille frontale de l’objectif est appelée la distance frontale. Dans des situations dans lesquelles l’échantillon est préparé pour être pris en image sans lamelle couvre-objet, la distance frontale est mesurée depuis surface de l’échantillon. Généralement, avec une série d’objectifs assortis, la distance frontale décroit avec les objectifs de plus fort grossissement et de plus grande ouverture numérique (voir le tableau 2). Dans la mesure où l’ouverture numérique est adéquate, les objectifs à sec doivent posséder des distances frontales aussi grandes que possible. Les objectifs à immersion en revanche doivent avoir des distances frontales très courtes afin de contenir le liquide d’immersion entre la lentille frontale et l’échantillon. De nombreux objectifs conçus avec des distances frontales courtes sont équipés d’un embout de rétraction monté sur ressort qui permet de rétracter l’ensemble de lentille frontale en poussant l’embout dans le corps de l’objectif et en le faisant pivoter pour le verrouiller en place. Un tel accessoire est très pratique pour éviter d’étaler de l’huile d’immersion sur la surface d’une lame propre lors de la rotation de la tourelle porte-objectifs pour changer d’objectif. Avant d’utiliser l’objectif, pour faire ressortir l’ensemble de lentille frontale, il suffit de trourner l’embout rétraction dans le sens opposé. Pour certaines applications (voir ci-dessous), une grande distance frontale libre est indispensable. C’est pour cela que des objectifs ont spécialement été conçus pour de telles utilisations, malgré la difficulté à produire des objectifs avec de grandes ouvertures numériques et le degré de correction optique requis.
L’une des avancées les plus significatives en matière de conception d’objectifs de ces dernières années est l’amélioration de la technologie de revêtement antireflet, qui permet de réduire les reflets non souhaités survenant lorsque la lumière traverse un système de lentilles. Chaque interface air/verre non revêtue peut refléter entre quatre et cinq pour cent de la lumière incidente d’un faisceau normal à la surface, ce qui se traduit par une valeur de transmission de 95 ou 96 pour cent à incidence normale. L’application d’un revêtement antireflet d’une épaisseur d’un quart de longueur d’onde et d’un indice de réfraction adapté peut abaisser cette valeur de trois à quatre pour cent. Étant donné que les objectifs deviennent de plus en plus complexes avec de plus en plus de lentilles, il est de plus en plus important d’éliminer les reflets internes. Certains objectifs récents avec un haut degré de correction peuvent contenir jusqu’à 15 lentilles et donc un grand nombre d’interfaces air/verre. Si les lentilles ne sont pas revêtues, les pertes par réflexion des seuls rayons axiaux pourraient faire baisser de près de 50 pour cent les valeurs de transmittance. Les revêtements monocouches des lentilles, qui étaient autrefois utilisés pour réduire les reflets et améliorer la transmission, ont été aujourd’hui supplantés par des revêtements multicouches permettant d’atteindre des valeurs de transmission de plus de 99,9 pour cent dans le spectre du visible.
La figure 8 illustre schématiquement des ondes lumineuses réfléchies par une lentille recouverte de deux couches antireflet ou la traversant. L’onde incidente rencontre la première couche (couche A de la figure 3) à un certain angle, ce qui entraîne la réflexion d’une partie de la lumière (R(o)) et la transmission d’une autre partie à travers la première couche. En rencontrant la deuxième couche antireflet (couche B), une autre partie de la lumière est réfléchie selon le même angle et interfère avec la lumière réfléchie par la première couche. Certaines des ondes lumineuses restantes poursuivent leur chemin jusqu’à atteindre la surface du verre, où elles sont une nouvelle fois à la fois réfléchies et transmises. La lumière réfléchie par la surface du verre interfère (de manière à la fois constructive et destructrice) avec la lumière réfléchie par les couches antireflet. Les indices de réfraction des couches antireflet diffèrent de celui du verre et de celui du milieu environnant (air). À mesure que les ondes lumineuses traversent les couches antireflet et la surface du verre, la majorité de la lumière (en fonction de l’angle d’incidence, qui est habituellement perpendiculaire à la lentille en microscopie optique) est finalement transmise à travers le verre et focalisée pour former une image.
Le fluorure de magnésium est l’un des nombreux matériaux utilisés pour les revêtements antireflet optiques en couche mince, mais la plupart des fabricants de microscopes mettent aujourd’hui au point leurs propres formules. Le résultat général est une amélioration spectaculaire du contraste et de la transmission des longueurs d’onde de la lumière visible avec une interférence destructrice concomitante dans des fréquences en relation harmonique situées en dehors de la bande de transmission. Ces revêtements spécialisés peuvent être facilement endommagés par une mauvaise manipulation. Aussi, le microscopiste doit avoir conscience de cette fragilité. Contrairement aux revêtements monocouches violacés, les revêtements antireflet multicouches présentent une teinte légèrement verdâtre. Cette différence de couleur peut donc être utilisée pour différencier les deux types de revêtements. La couche superficielle des revêtements antireflet utilisés sur les lentilles internes est souvent moins dure que celle des revêtements correspondants conçus pour protéger les surfaces des lentilles externes. Un grand soin doit être porté lors du nettoyage des surfaces optiques revêtues de films fins, notamment si le microscope a été démonté et si les lentilles internes doivent être soumises à un examen minutieux.
La longueur focale d’un système de lentilles est définie comme la distance entre le centre de la lentille et un point de l’axe optique où les rayons parallèles sont focalisés (souvent appelé le point focal principal). Un plan d’imagerie perpendiculaire au point focal principal est appelé le plan focal du système de lentilles. Chaque lentille possède deux points focaux principaux pour la lumière pénétrant par chacune de ses faces, un point à l’avant de la lentille et un à l’arrère. Par convention, le plan focal de l’objectif le plus proche de la lentille frontale est appelé plan focal frontal, tandis que le plan local situé derrière l’objectif est nommé plan focal arrière. La position effective du plan focal arrière varie en fonction de la structure de l’objectif, mais pour les objectifs de fort grossissement, il est généralement situé à l’intérieur du barrillet de l’objectif. Les objectifs de faible grossissement ont souvent leur plan focal arrière situé à l’extérieur du barrillet, au niveau du filetage ou à l’intérieur de la tourelle porte-objectifs du microscope.
Lorsque les rayons de lumière passent à travers un objectif, ils sont limités par l’ouverture arrière ou la pupille de sortie de l’objectif. Le diamètre de cette ouverture varie entre 12 millimètres pour les objectifs de faible grossissement et 5 millimètres environ pour les objectifs apochromatiques de fort grossissement. La taille de l’ouverture est extrêmement critique pour les applications en épi-illumination pour lesquelles l’objectif sert à la fois de système d’imagerie et de condenseur, avec la pupille de sortie faisant également office de pupille d’entrée. L’image de la source de lumière doit complètement remplir l’ouverture arrière de l’objectif pour produire un éclairage uniforme de tout le champ d’observation. Si l’image de la source de lumière est plus petite que l’ouverture, le champ d’observation souffrira de vignettage à cause de l’éclairage non uniforme. En revanche, si l’image de la source de lumière est plus grande que l’ouverture arrière, une partie de la lumière n’entrent pas dans l’objectif et l’intensité de l’éclairage est réduite.
En conclusion, le développement d’objectifs de microscope de haute qualité a été initié par Ernst Abbe qui, en collaboration avec Carl Zeiss et Otto Schott, fut le premier à concevoir des objectifs apochromatiques et des oculaires de compensation à la fin des années 1880. La grande avancée suivante en matière de conception d’objectifs eut lieu à la fin des années 1930 lorsque Han Boegehold (Zeiss) fabriqua les premiers objectifs planachromatiques et planapochromatiques. Plus récemment, le développement de composants optiques « sans chrome » (CF) par Zenji Wahimot (Nikon) et Horst Rieseneberg (Zeiss) fut à l’origine d’une nouvelle révolution en matière de conception d’objectifs de microscope.
De nombreux objectifs de microscope fabriqués aujourd’hui offrent des degrés d’aberrations et d’imperfections remarquablement faibles, sous réserve que l’objectif approprié ait été choisi et utilisé correctement. Le microscopiste doit toutefois être conscient que les objectifs ne sont pas conçus pour être parfaits à tous points de vue mais pour satisfaire à un certain ensemble de caractéristiques techniques en fonction de l’utilisation prévue, des contraintes de dimensions et des gammes de prix. Ainsi, les objectifs sont fabriqués avec différents degrés de correction des aberrations sphériques et chromatiques, différentes tailles et planéités de champ, différentes longueurs d’onde de transmission et différents degrés d’absence de fluorescence, de biréfringence et d’autres facteurs contribuant au bruit de fond. En outre, ils sont conçus pour être utilisés dans des conditions bien particulières, comme avec des longueurs et des lentilles de tube spécifiques, un certain type et une certaine épaisseur du milieu d’immersion et des lamelles couvre-objet, et des plages de longueurs d’onde, des tailles de champ, des types d’oculaires et des condenseurs spécifiques. Le but ultime du microscope optique est de fournir un grossissement utile qui permet d’observer des échantillons minuscules dans les moindres détails et d’exposer ainsi un monde caché d’objets invisibles à l’œil nu qui resteraient autrement inconnu.
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